Analyse du deuxième mouvement : La ville du colonisé vue par les colons
Dans ce deuxième mouvement de l'extrait des "Damnés de la terre", Frantz Fanon opère un contraste saisissant en décrivant la ville du colonisé à travers le regard méprisant des colons. Cette partie du texte met en lumière la déshumanisation et la frustration vécues par les populations colonisées.
Fanon utilise une construction parallèle pour opposer directement les caractéristiques des deux villes. L'emploi répété du présentatif "c'est" ("c'est une ville", "c'est un monde") et la reprise des mêmes thèmes en début de phrase ("la ville du colon", "la ville du colonisé") accentuent ce contraste.
Quote: "C'est une ville affamée, affamé de pain, de viande, de chaussures, de charbon et de lumières."
L'auteur dépeint un monde de confusion et de désorganisation à travers l'utilisation de pronoms indéfinis comme "n'importe où" et "n'importe comment", ainsi qu'un champ lexical de l'entassement et de la multitude ("peuple", "sans intervalles"). Le parallélisme "les uns sur les autres" et "les unes sur les autres" renforce cette image de promiscuité et de surpeuplement.
Highlight: La répétition de l'adjectif "affamé" forme une énumération pléthorique qui souligne le manque généralisé dans la ville du colonisé.
Fanon emploie à nouveau la personnification pour décrire la ville du colonisé, mais cette fois-ci pour évoquer la soumission et l'humiliation. Les expressions "une ville accroupie", "une ville à genoux", "une ville vautrée" créent une anaphore et une gradation qui illustrent la déshumanisation subie par les colonisés.
Definition: L'anaphore est une figure de style qui consiste à répéter un mot ou un groupe de mots au début de phrases ou de propositions successives.
L'auteur n'hésite pas à citer les termes péjoratifs utilisés par les colons, tels que "ville de nègres" ou "ville de bicots", pour mettre en évidence le mépris et le racisme inhérents au système colonial.
Enfin, Fanon analyse la frustration des colonisés en énumérant leurs désirs d'appropriation. Il utilise le champ lexical de la convoitise ("envieux", "rêve") et une gradation de verbes d'action pour mimer l'invasion redoutée par les colons. Cette description culmine avec l'expression du désir ultime : "s'asseoir à la table du colon, coucher dans le lit du colon, avec sa femme si possible".
Cette analyse détaillée de la ville du colonisé permet à Fanon de dénoncer les effets dévastateurs de la colonisation sur les populations opprimées, tout en mettant en lumière les tensions et les frustrations qui sous-tendent le système colonial.