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14/10/2023
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français ANALYSE LINÉAIRE Jean-Luc Lagarce, Juste la fin du monde, Prologue, 1990 Les déclarations d'un homme déjà mort 1.1 à l.14 II_ La décision de Louis de retourner voir sa famille I.15 à 1.28 III Louis, metteur en scène de sa maitrise du destin 1.29 à 1.36 texte n°11 Nous nous demanderons en quoi ce prologue qui joue sur la confusion, annonce au lecteur spectateur une intrigue qui semble à la fois traditionnelle et moderne. INTRO: Jean-Luc Lagarce est à la fois comédien, metteur en scène, directeur de troupe et dramaturge du XXe siècle. Malgré sa mort prématurée en 1995, à l'âge de 38 ans, il laisse derrière lui plusieurs dizaines de pièces qui rencontreront un succès posthume. Lagarce a écrit Juste la fin du monde en 1990, qui adopte la structure de la tragédie. Cette pièce est d'abord refusée par tous les comités de lecture et elle ne sera montée qu'en 1999. Elle exhibe la solitude des personnages en décalage avec leur famille et révèle leurs propre conflits intérieurs. Sans être totalement autobiographique, Jean-Luc Lagarce parle aussi de son histoire dans cette oeuvre. On peut considérer qu'il s'insère dans le courant du théâtre de l'absurde. L'extrait à analyser constitue le "prologue" de la pièce, forme héritée de l'antiquité, qui, traditionnellement, a pour fonction d'exposer le sujet. Mais cette...
Louis B., utilisateur iOS
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forme traditionnelle entre en tension avec des éléments beaucoup plus modernes présents dans le texte. En effet, il s'agit ici d'un monologue qui déploie une phrase unique d'environ 35 lignes. CONCLUSION: Le Prologue, qui rend compte de la crise personnelle de Louis, se situe donc entre modernité et tradition. En effet, de la tradition, le texte reprend la forme du Prologue, l'adresse au public, les thèmes de la fatalité et de la mort ainsi que le personnage du messager et la thématique du retour... Il s'inscrit cependant dans la modernité par son brouillage de la temporalité, qui refuse le réalisme, par la construction d'une phrase à rallonge, qui multiplie les répétitions, les corrections, tout en avançant, et qui annonce un drame qui sera centré non sur l'action mais bien sur le langage. La pièce reprend la thématique biblique du retour du fils prodigue mais celle-ci est détournée ici, car on note l'impasse tragique du retour : le fils prodigue « ne revient pas à la vie », mais il est voué à une mort prochaine, soumis à la fatalité de sa condition humaine. 1ER MOUVEMENT: Les déclarations d'un homme déjà mort 1.1-1.14 PROLEPSE → « Plus tard, l'année d'après, j'allais mourir à mon tour ». Louis annonce des faits qui se produiront plus tard. = tonalité prophétique rappelle la tragédie grecque où le choeur tragique annonçait souvent de façon énigmatique ce qui allait se passer. PARENTHÈSE → <<- j'aillais mourir à mon tour ». Vient suspendre la phrase et témoigne d'une parole non linéaire, hachée + la rend l'information délivrée secondaire, or il s'agit ici d'une information cruciale : sa mort. << Plus tard, l'année d'après » → 2 INDICATEURS TEMPORELLES QUI OUVRENT VERS LE FUTUR << j'allais mourir » → IMPARAFAIT << maintenant » → CCT au présent • Confusion et brouillage temporelle qui donne au prologue une sorte de tonalité onirique et déstabilise le lecteur/ spectateur : Louis semble déjà mort, comme si sa voix était une voix d'outre-tombe. PRÉCISION → << j'ai près de trente-quatre ans ». Jean-Luc Lagarce prend soin de préciser l'âge de son personnage. Il souligne ainsi la jeunesse du condamné qui sera fauchée par la mort. POLYPTOTE → « mourrai » « mourir »>. Renforce la présence tragique de la mort. Ainsi le personnage est sans illusion sur son sort (FUTUR DE CERTITUDE → << je mourrai »> = donner la parole à un mort = PROSOPOPÉE) La reprise ANAPHORIQUE → <«< l'année d'après » x5. Montre un retour au point de départ soulignant l'idée de fatalité et suggérant une prise de parole difficile qui peine à avancer. Ainsi, le temps apparaît comme la véritable force tragique de cette pièce comme le montre cette insistance sur l'ancrage temporel. Temps dévorateur. La maladie et la mort sont comme un parasite qui vient s'incruster dans la phrase et empêcher tout sens, toute parole. ANAPHORE → << de nombreux mois »>. Révèle une attente qui est comme un séjour dans les lymbes car il est comme coincé entre les morts. RÉPÉTITION DE L'IMPARFAIT → « j'attendais » x2 + NÉGATION → « ne rien faire » « ne plus savoir • L'imparfait inscrit l'action dans la durée et rend compte d'une attente. À l'approche de la mort, Louis confie avoir été gagné par une immobilité funeste. Il apparaît comme un personnage figé dans l'inaction, la passivité. << un danger extrême »>«< trop violent » << ennemi » « détruisait » → CHAMP LEXICAL DE LA VIOLENCE • Le texte se teinte d'une couleur épique. L'ennemi à combattre serait la mort. EMPLOI DES PRONOMS → passage du « je » à l'emploi de « on » et «< vous ». Louis s'efface lui- même progressivement. Anéantissement progressif du personnage mais aussi une forme de généralisation (qui crée un lien, une empathie avec le lecteur) VERS COURT → « la peur ». Le personnage avoue ainsi son angoisse existentielle, sa peur de mourir. 2ÈME MOUVEMENT: La décision de Louis de retourner voir sa famille 1.15-1.28 VERBE → « décidai » + retour de la 1ÈRE PERSONNE → « je ». Il affirme sa volonté d'action pour mener un combat contre la maladie et la mort en revenant dans sa famille. ÉNUMÉRATION de 4 VERBES d'action à l'infinitif (épanorthose) → << retourner >> << revenir » << aller >> << faire ». Affirmation du personnage en mouvement, en action, seulement dans la parole car il est immobile. POLYSÉMIE de l'expression → « faire le voyage ». Pour évoquer le passage symbolique de la vie à la mort. Ici, Louis conjure momentanément la mort par un voyage inversé, qui est une remontée dans le temps, un retour dans le cocon familial. << lentement, avec soin, avec soin et précision » « lentement, calmement, d'une manière posée ÉNUMÉRATION DE CC DE MANIÈRE/ ÉPANORTOSE . • Témoignent d'une difficulté à trouver le bon mot. En effet, ils expriment de manière différentes et en même temps assez proche les modalités de l'annonce. Cela témoigne d'une volonté d'être précis, de trouver le mot juste et la peur de se tromper. PROLEPSE → «<- ce que je crois- ». Louis semble se dédoubler. Louis du futur sait que cela ne va pas se passe comme prévu. << ?, »>. La pièce est un long souffle qui se prolonge car il y a une virgule après un point ce qui est original. RÉPÉTITION de l'adjectif → << posé ». Le personnage met en place un début d'autoportrait : insiste sur le caractère serein et réfléchit du personnage. Le personnage met en scène l'annonce de sa mort dans une volonté de maitrise CHAMPS LEXICAL DE LA PAROLE → « dire » « annoncer » « messager ». La parole semble être le cœur de l'intrigue, le sujet véritable de la pièce. De plus le terme de messager rappelle la figure des choeurs chez Sophocle et renvoie donc encore une fois à la tragédie. La place de Louis est particulière : il est à la fois victime du destin mais également voix du destin comme s'il pouvait dominer la fatalité par l'annonce qu'il s'apprête à faire. 3ÈME MOUVEMENT : Louis, metteur en scène de sa maitrise du destin 1.29-1.36 - Le personnage fait preuve d'ironie tragique : avec lucidité, il souligne son sentiment illusoire de ne pouvoir décider de sa vie, puisque ce combat de la volonté contre le destin est perdu d'avance.- CHAMP LEXICAL de la volonté → « voulu », « voulu et décidé », « décider », être responsable de moi-même » « mon propre maître ». Il a une volonté de maitrise et il affirme le pouvoir de décision. mais cela s'oppose au CHAMPS LEXICAL de l'illusion → « paraître » x2, « peut-être », « illusion ». Suggère le fait que Louis ment, triche, qu'il est dans l'apparence et l'illusion. Le personnage a donc pleinement conscience de son destin inévitable mais il a du mal à l'admettre. JEU DES PRONOMS → « toi, vous, elle ». Le 4ème mur du théâtre s'écroule. Il instaure une complicité avec les spectateurs en exploitant la double énonciation. Et en impliquant les spectateurs par ses apostrophes complices, le protagoniste souligne que nous partageaons tous la même condition mortelle, que nous appartenons à une communauté fraternelle soumise au même sort. TERMES finaux → « mon propre maître ». L'ironie est que Louis ne sera ni acteur, ni metteur en scène : il sera obligé d'écouter les reproches des membres de sa famille.