La Cour comme pays étranger
La Bruyère commence par décrire un étrange "pays" où les générations semblent inversées. Les vieillards y sont "galants, polis et civils" tandis que les jeunes se montrent "durs, féroces, sans mœurs ni politesse". Ce contraste saisissant établit d'emblée un monde où les valeurs naturelles sont renversées.
L'auteur dénonce ensuite les excès des courtisans à travers leurs comportements débauchés. Les jeunes hommes préfèrent les "repas, viandes et amours ridicules" aux femmes, faisant allusion à l'homosexualité. Leur consommation excessive d'alcool est présentée par une gradation frappante : vin, eau-de-vie, liqueurs violentes, jusqu'à presque boire de "l'eau-forte" !
Les femmes de la cour ne sont pas épargnées. Elles accélèrent "le déclin de leur beauté" par des artifices excessifs, se maquillant abondamment et s'exhibant de manière indécente. Les hommes, quant à eux, portent d'épaisses perruques qui "changent les traits" et les rendent méconnaissables, symbolisant parfaitement le masque social de la cour.
💡 À retenir : La stratégie de La Bruyère est brillante ! En prétendant décrire un pays lointain, il peut critiquer librement la cour de Louis XIV sans risquer la censure directe.
Cette première partie établit la cour comme un monde à part, coupé de la réalité, où règnent les excès et l'artificialité. La Bruyère utilise cette métaphore filée du regard étranger pour mieux révéler l'absurdité des comportements qu'il observe.