Les imprécations de Camille: violence et rupture
La réponse de Camille vers1278−1294 est tout aussi violente que l'attaque de son frère. Elle commence par qualifier Horace de "barbare", terme doublement insultant puisqu'il signifie à la fois "non-romain" et "cruel", remettant en question son humanité même.
Camille pose un ultimatum à son frère avec une construction parallèle percutante: "Rends-moi mon Curiace, ou laisse agir ma flamme". L'impossibilité de la première option rend la seconde inévitable. Elle refuse catégoriquement de se soumettre et affirme la force de ses sentiments à travers un parallélisme antithétique frappant: "Je l'adorais vivant, et je le pleure mort".
Le rejet du lien fraternel est explicite lorsque Camille déclare: "Ne cherche plus ta sœur". Elle rompt toute attache familiale pour s'affirmer uniquement comme "amante offensée". La métaphore violente du "tigre altéré de sang" qu'elle utilise pour désigner son frère souligne son dégoût face à sa cruauté.
🔥 Point d'analyse: Les imprécations de Camille constituent un véritable coup de théâtre car elle transgresse l'ordre social et familial en plaçant son amour personnel au-dessus de tout. Dans la France du XVIIe siècle, cette attitude était perçue comme scandaleuse.
La tirade s'achève sur une terrible malédiction: Camille souhaite que des malheurs s'abattent sur son frère et que sa gloire soit souillée. Cette haine culminera dans la suite par le souhait de voir Rome entière détruite. La phrase "Rome, l'unique objet de mon ressentiment" est l'une des plus célèbres de la pièce, où Camille rejette complètement les valeurs patriotiques que son frère défend.
Cette confrontation mène au meurtre de Camille par son frère, qui ne peut supporter ce qu'il considère comme une trahison ultime envers la famille et la patrie. Les deux personnages, également intransigeants et excessifs, illustrent parfaitement l'impossibilité de concilier devoir et passion.