L'équilibre entre corps et esprit
La deuxième partie du texte du chapitre 23 montre comment l'éducation se poursuit harmonieusement entre activités intellectuelles et physiques. L'expression "Puis pendant trois bonnes heures, on lui faisait la lecture" indique que l'élève reste d'abord dans une position d'écoute attentive, tandis que le maître transmet son savoir.
Mais rapidement, Rabelais introduit le mouvement : "Cela fait, ils sortaient, toujours en discutant du sujet de la lecture". Cette sortie marque une transition dans la journée d'étude, sans pour autant abandonner l'exercice intellectuel. L'apprentissage se poursuit en marchant, à la manière des philosophes péripatéticiens de l'Antiquité.
L'analyse linéaire révèle ensuite l'importance accordée aux activités physiques à travers l'énumération des jeux : "ils jouaient à la balle, à la paume, à la pile trigone". Cette dimension ludique n'est pas considérée comme une simple récréation, mais comme partie intégrante de l'éducation. La proposition "qu'ils avaient auparavant exercé leurs âmes" établit un parallèle significatif entre l'exercice du corps et celui de l'esprit.
🌟 L'originalité de Rabelais est de placer l'élève au centre de ses apprentissages en valorisant l'autonomie et la liberté : "jeu se faisant en toute liberté", "selon leur bon plaisir", "quand leur corps était en sueur".
Le champ lexical du corps associé à celui du plaisir montre que l'éducation humaniste ne néglige pas l'épanouissement physique. Contrairement à l'éducation médiévale, Rabelais prône une formation complète où aucune dimension de l'être n'est sacrifiée. Cette conception rejoint celle de Montaigne dans "De l'institution des enfants", où l'approche concrète facilite l'assimilation des connaissances.
Cette éducation équilibrée vise ultimement à former Gargantua pour qu'il devienne un roi éclairé, capable de partager son savoir avec son peuple. L'analyse du chapitre 23 de Gargantua nous offre ainsi une réflexion toujours actuelle sur les principes d'une éducation idéale.