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12/06/2022
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Dissertation: La littérature d'idée Ambre MACAIRE 1B A la fin de son autobiographie, Jean-Paul Sartre écrit «< Longtemps j'ai pris ma plume pour une épée, à présent je connais notre impuissance »>. Dans cette citation il dit avoir utilisé les mots comme une arme, c'est-à-dire, des instruments permettant d'attaquer un ennemi ou de se défendre. Olympe de Gouges, Gisèle Halimi, Virginie Despentes, nombreux sont ceux qui utilisent les mots pour essayer de changer la société. Ces auteurs sont conscients du pouvoir des mots et les emploient de diverses manières. C'est ainsi qu' en 1791 Olympe de Gouges publie une réécriture la la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen car elle estime que les femmes sont exclues de ce texte. Dans sa Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne elle revendique notamment l'égalité femme-homme et le droit à la participation politique. Quelques siècles plus tard, les femmes obtiennent le droit de vote, mais les combats ne sont pas terminés. Gisèle Halimi publie La cause de femmes, roman dans lequel elle expose entre autre son combat pour le droit à l'avortement. En 2006, Virginie Despentes publie un essai dans un registre nettement plus polémique dans lequel elle se bat contre le sexisme toujours présent dans nos sociétés. Dans tous ces textes, les auteures utilisent...
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la puissance des mots pour mettre en valeur leur propos. On peut donc se demander si les mots peuvent être comparés à des armes? Nous montrerons d'abord qu'ils peuvent permettre de combattre ou protéger quelqu'un ou une cause. Ensuite nous aborderons les autres fonctions des mots. Finalement nous verrons que la diffusion ou la réception d'un discours peut réduire voire annihiler l'impact du texte. Tout d'abord, un auteur peut se servir des mots pour attaquer. Olympe de Gouges par exemple, s'attaque dans son texte et en particulier dans le postambule, à la tyrannie des hommes. "L'homme esclave a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers". Elle souligne que les hommes n'auraient pas pu faire la révolution sans l'aide des femmes mais qu'une fois libérés de leurs chaînes les hommes ont mis les femmes de côté et les ont opprimées "Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne". L'ingratitude et le mépris des hommes a eu pour conséquence la mise de côté des femmes et la non reconnaissance de leurs droits. Pour justifier cette attaque de la tyrannie des hommes et remporter l'adhésion des lecteurs, Olympe de Gouges s'appuie sur un raisonnement étayé. Elle utilise donc des arguments d'autorité comme l'argument de la nature pour convaincre les lecteurs de la justesse de son propos. En effet, elle s'inspire des idées revolutionnaires de Rousseau disant que l'égalité homme-femme est naturelle mais que par leur ingratitude les hommes "ont corrompu le sage décret de la nature”. Olympe de Gouges utilise donc les mots commes des armes afin d'attaquer. Elle utilise ensuite le langage comme outil de conviction afin de justifier son attaque. Les armes peuvent également servir à défendre une cause. Ainsi, l'avocate Gisèle Halimi se sert des mots pour défendre le droit à l'avortement. Contrairement à Olympe de Gouges, elle n'utilise pas seulement les mots pour convaincre mais cherche aussi à provoquer des émotions chez le lecteur afin de le convaincre et de le persuader du bien fondé de son combat. Dans le chapitre "Le procès de Bobigny" de son roman La cause des femmes, Gisèle Halimi cite un passage de sa plaidoirie: "Messieurs, regardez-vous, et regardez-nous... Quatre femmes comparaissent devant quatre hommes pour parler de quoi? De leur utérus, de leurs avortements, de leur exigence d'être physiquement libres... Est-ce que l'injustice ne commence pas là?". Ce court extrait montre que Madame Halimi utilise des arguments logiques afin d'augmenter sa défense. En effet, elle emploie l'ethos, la logique du triangle de la rhétorique d'Aristote. Ce sont les mots qui prennent ici le rôle d'armes pour protéger Marie-Claire des épées de la justice. Le tract pour défendre Marie-Claire présent dans les annexes de La Cause des Femmes montre encore une fois cette utilisation des mots comme une arme pour se défendre. Cette fois ce n'est pas l'ethos (la logique) qui est utilisée mais un autre aspect du triangle: le pathos c'est-à-dire la psychologie. En effet, l'avortement de Marie-Claire est décrit comme "le drame de l'avortement clandestin" et le tract souligne la difficulté de la situation "parce que comme toujours dans ces cas-là, elle s'est retrouvée SEULE pour s'en sortir". Ici les mots du tracts cherchent donc à travers des mots forts comme "drame" et "seule" à toucher le lecteur, à l'émouvoir pour défendre Marie-Claire et persuader le public de son innocence. Cependant, il serait réducteur de dire que les mots n'ont pour vocation que de blesser ou de défendre. Ils peuvent aussi avoir pour but de provoquer le débat, et éclairer le lecteur sur les réalités de la société afin de remédier aux injustices. Ainsi dans son chapitre intitulé "Avortement et sexualité" Gisèle Halimi informe les lecteurs de la situation en France dans les années 70 en termes de contraception. Ce passage informatif lui permet ensuite de justifier son combat. Elle aborde par exemple la difficulté de se procurer de la contraception, elle indique ainsi que seulement "6 à 7% de femmes, en France, pratiquent la contraception". La contraception est pourtant à cette époque légale, mais elle n'est pas très répandue. Selon Gisèle Halimi, il n'y a effectivement pas d'information claire et publique sur la contraception. De plus, elle s'inquiète d'une "véritable contre-propagande" qui répand par exemple de fausses informations en disant que la pilule est dangereuse. Cela a pour résultat, selon Gisèle Halimi, un nombre d'avortements bien plus élevé que ce qu'il ne devrait être car les femmes ne peuvent pas se protéger correctement lors d'un rapport sexuel. Elle utilise donc ses mots pour montrer au lecteur la réalité et ainsi justifier son combat. Les mots peuvent aussi inciter les gens à débattre et échanger sur un sujet. Ainsi, dans King-Kong Théorie, Virginie Despentes évoque l'impact du viol et le processus de reconstruction qui suit. Le viol est un sujet très controversé et qui peut s'accompagner d’un traumatisme important. Dans son récit, Virginie Despente expose sa colère sur la manière dont le viol est vu dans notre société: "Je suis furieuse contre une société qui m'a éduquée sans jamais m'apprendre à blesser un homme s'il m'écarte les cuisses de force, alors que cette même société m'a inculqué l'idée que c'était un crime dont je ne devais jamais me remettre.". Cependant, elle n'impose pas sa vision de la situation mais nous incite plutôt à nous faire notre propre opinion et à en discuter avec d'autres personnes créant ainsi un débat. Elle dit "Le viol c'est la guerre civile, l'organisation politique par laquelle un sexe déclare à l'autre : je prends tous les droits sur toi, je te force à te sentir inférieure, coupable et dégradée." mais tente aussi de montrer que chaque victime a son propre processus de reconstruction. Il ne faut pas généraliser ni dire que le viol nous handicappe à jamais, mais plutot entrer en discussion afin de permettre à tous les avis de s'exprimer même s'ils divergent. Mais, les mots n'ont pas un pouvoir total, voire dans certains n'ont aucun impact, les mots ne touchent pas forcément les lecteurs. En effet, afin de changer la société à travers un texte, il faut que ce texte soit lu par une partie importante de la population. Or, certains textes comme La Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne ont été très peu diffusés ce qui ne leur a pas permis d'avoir la portée revolutionaire visée. En effet, le texte d'Olympe de Gouges n'a été publié qu'en cinq exemplaires à l'époque où il a été écrit. Olympe de Gouges ne renconterera donc pas beaucoup de succès et sera ironiquement guillotinée deux ans après la publication de son texte, alors qu'elle revendiquait le droit à la participation politique en disant "La femme a droit de monter sur l'échafaud; elle doit avoir également celui de monter à la tribune". De plus, à l'époque peu de femmes avaient reçu une bonne éducation. Même si l'œuvre avait donc été publiée à une échelle plus importante, la majorité des femmes aurait été dans l'impossibilité de la lire. Les appels aux combats pour revendiquer leurs droits menés par Olympe de Gouges auraient donc été vains. L'œuvre d'Olympe de Gouges n'a effectivement été sortie des oubliettes que de nombreuses années plus tard par Benoîte Groult. Cette romancière féministe publie pour la première fois dans son intégralité en 1986, le texte de La Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne permettant à Olympe de Gouges de recevoir la reconnaissance qu'elle mérite. De plus, certains textes subissent une très forte critique qui vise à les dévaloriser. Ainsi, King-Kong Théorie de Virginie Despentes a reçu des avis très négatifs suite à sa parution. L'essai aborde des sujets très controversés comme la prostitution, la sexualité feminine et le féminisme. Le journal Le Figaro a fortement critiqué Virginie Despentes lors de la publication de son livre. Ainsi, un article du journal montre la forte opposition qu'il ressent: "<< MANIFESTE pour un nouveau féminisme », annonce l'éditeur en quatrième de couverture. L'argument est porteur. En fait, il est trompeur.". En effet, selon eux texte montre le féminisme comme une lutte des classes et non pour les droits des femmes. De plus, le journal s'indigne du vocabulaire utilisé dans l'essai: "Retenons le mot de la fin : « Tout foutre en l'air », et on aura saisi qu'il est inutile de chercher une cohérence intellectuelle à cet essai plein de gros mots.". Le Figaro condamne le texte de Virginie Despentes et le discrédite en désapprouvant les mots et le style utilisés par l'auteure avec pour résultat de minimiser l'impact du texte. En conclusion, le langage a de multiples vocations. Il peut non seulement être utilisé comme une arme afin de s'attaquer à un problème sociétal ou de défendre une injustice mais peut aussi permettre d'informer le lecteur ou l'inciter à la réflexion et au débat. Même si les mots peuvent avoir un impact important et profondément changer une société, leur pouvoir n'est pas sans fin. En effet, un texte n'atteint pas toujours son public ou est tellement critiqué qu'il est discrédité ce qui anéantit complètement les mots qu'il contient. Mais, si les mots et l'art permettent de défendre des causes ou d'exprimer son opinion, on peut se demander s'il existe des limites à la liberté d'expression. Ainsi en 2015, les attentats de Charlie Hebdo ont montré les risques auxquels s'exposaient les journalistes. On peut donc s'interroger sur les limites de la liberté d'opinion et d'expression. Est-ce que tous les mots sont acceptables et peuvent être publiés?