Le double jeu d'Elmire
Le déploiement du stratagème d'Elmire repose sur un ingénieux double discours. D'un côté, elle feint de céder aux avances de Tartuffe, et de l'autre, elle s'adresse indirectement à Orgon caché sous la table. Cette double énonciation crée une tension théâtrale captivante pour le spectateur.
Face à Tartuffe, Elmire se présente comme une femme vertueuse qui cède à contrecœur. Elle utilise un champ lexical du consentement et de la lutte, présentant un faux dilemme cornélien. Avec des expressions comme "puisque" (v.12) et la diérèse sur "violence" (v.17), elle simule parfaitement la résignation devant les avances insistantes de Tartuffe.
Simultanément, elle communique subtilement avec Orgon à travers des pronoms indéfinis comme "on" (v.9, 12-14) et des expressions généralisantes comme "les gens" (v.12). Le vocabulaire du "témoin" et du "croire" (v.13-14) établit un pacte implicite avec Orgon qui, en ne sortant pas de sa cachette, accepte de poursuivre la ruse.
Cette scène est un parfait exemple de comédie de caractère où la manipulation et les quiproquos permettent de révéler les véritables natures des personnages. Le jeu d'Elmire montre une intelligence et une maîtrise de la situation qui contraste avec l'aveuglement d'Orgon et l'hypocrisie de Tartuffe.