Enjeux et pratiques de la forêt française depuis Colbert
La forêt française constitue depuis la préhistoire une ressource essentielle pour les populations, fournissant nourriture, matériaux de construction, chauffage et énergie. À l'époque moderne, cette ressource devient stratégique pour les États.
Sous Louis XIV, Jean-Baptiste Colbert, préoccupé par une possible pénurie de bois, constate une diminution alarmante de la superficie forestière française qui a été divisée par plus de moitié entre 1450 et 1700.
Pour remédier à cette situation, Colbert édicte en 1669 l'Ordonnance des eaux et forêts, également appelée la Grande Réformation, qui marque un tournant décisif dans la gestion forestière française :
- Centralisation de la gestion par l'État
- Cartographie systématique des forêts du royaume
- Évaluation de la qualité des ressources disponibles
- Mise en place de campagnes de reboisement
- Création de la charge royale des Grands-maîtres pour surveiller l'application des règles
Cette ordonnance retire la gestion des forêts aux communautés villageoises, à la noblesse et aux monastères pour l'attribuer à l'État centralisateur qui impose des règles strictes.
Concept clé : Le ressourcisme est une vision anthropocentrée de la nature qui considère la forêt comme une ressource à exploiter durablement pour servir les intérêts humains. Cette approche a profondément façonné les forêts françaises actuelles.
Cette rationalisation de l'espace forestier se traduit par la division des forêts en parcelles, comme l'illustre l'exemple des forêts lorraines où une partie est exploitée pour le bois de chauffage des habitants tandis qu'un "quart de réserve" est dédié à la production de bois de construction.
Cette vision ressourciste s'est renforcée aux XIXe et XXe siècles avec notamment :
- La plantation de la forêt des Landes de Gascogne dès 1852
- La création de l'Office National des Forêts ONF en 1964
Le résultat de cette approche est visible dans la structure actuelle des forêts françaises :
- Quasi-disparition des forêts primaires
- Diminution des forêts anciennes
- Prédominance des futaies géométriques à faible biodiversité