Analyse de la deuxième strophe
La deuxième strophe du poème "Spleen IV" de Baudelaire poursuit la description du paysage intérieur torturé, en accentuant la transformation du monde extérieur en reflet de l'état psychologique du narrateur. Cette strophe illustre parfaitement le concept de paysage état d'âme, central dans la poésie symboliste.
Le vers 5 marque une évolution significative dans l'imagerie du poème :
"Quand la terre est changée en un cachot humide,"
Highlight: Ce vers ne présente ni une comparaison ni une métaphore, mais une véritable métamorphose. Le verbe "changée" indique une transformation complète de la réalité, reflétant l'alchimie poétique opérée par Baudelaire.
La terre, symbole de stabilité et de vie, devient un "cachot humide", évoquant l'enfermement et la décomposition. Cette image renforce le sentiment de claustrophobie et d'oppression déjà présent dans la première strophe.
Les vers suivants introduisent des éléments fantastiques et inquiétants :
"Où l'Espérance, comme une chauve-souris,
S'en va battant les murs de son aile timide
Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;"
Vocabulaire: L'Espérance, écrite avec une majuscule, devient une allégorie, une personnification d'un concept abstrait. Cette figure de style est typique de la poésie symboliste.
La comparaison de l'Espérance à une chauve-souris est particulièrement frappante. Cet animal nocturne, souvent associé à des connotations négatives dans l'imaginaire collectif, représente ici la dernière lueur d'espoir, mais une lueur faible et désorientée.
Exemple: La chauve-souris, aveugle et maladroite dans un espace confiné, symbolise l'impuissance de l'espoir face à l'oppression du spleen.
Les "murs" et les "plafonds pourris" renforcent l'image du cachot, suggérant un espace en décomposition, à la fois physique et métaphorique. L'espoir, personnifié, se heurte littéralement aux limites de cet espace clos, illustrant l'impossibilité d'échapper à cet état d'esprit accablant.
Cette strophe illustre parfaitement la technique de Baudelaire consistant à mêler des éléments concrets et abstraits pour créer une atmosphère à la fois tangible et profondément psychologique. Le spleen, cet état de mélancolie profonde, transforme non seulement la perception du monde, mais le monde lui-même, dans une fusion totale entre l'intérieur et l'extérieur.