Procédés littéraires et style de La Bruyère

La Bruyère utilise une variété de procédés littéraires pour renforcer l'impact de sa critique sociale. Son style vif et imagé crée de véritables scènes de comédie, tout en poursuivant un but moral.

Vocabulary: Theatrum mundi - concept selon lequel le monde est un théâtre où chacun joue un rôle.

L'auteur emploie fréquemment des métaphores, des hyperboles et des parallélismes pour critiquer les défauts de ses contemporains. Par exemple, dans la remarque 62 du Livre VIII, il utilise une accumulation d'éléments pour décrire le comportement frénétique des courtisans :

Quote: "Qui pourrait les représenter exprimerait l'empressement, l'inquiétude, la curiosité, l'activité, saurait peindre le mouvement. On ne les voit courir, parler en courant, et vous interroger sans attendre de réponse."

La Bruyère s'adresse souvent directement au lecteur, le rendant complice de sa critique. Il utilise également des dialogues et des discours rapportés pour donner vie à ses personnages et renforcer l'aspect théâtral de son œuvre.

Highlight: Le style de La Bruyère met l'accent sur l'univers sonore, rappelant les techniques théâtrales. Les personnages sont souvent audibles avant d'être visibles, comme Théodecte qui "grossit sa voix à mesure qu'il s'approche" (Remarque 12, Livre VIII).

Analyse des personnages et des situations

La Bruyère excelle dans l'art du portrait, créant des personnages mémorables qui incarnent les travers de la société. Ces portraits sont souvent construits autour de contrastes saisissants ou de situations révélatrices.

Example: Dans la remarque 83 du Livre VI, l'auteur oppose Giton, le riche, à Phédon, le pauvre : "Giton a le teint frais, le visage plein [...] il est riche" tandis que "Phédon a les yeux creux, le teint échauffé [...] il est pauvre".

Ces portraits ne se limitent pas à des descriptions physiques, mais révèlent également les attitudes et les comportements typiques de certains groupes sociaux. La Bruyère utilise souvent l'ironie et l'exagération pour souligner les ridicules de ses personnages.

Quote: "Il pleure d'un œil et rit de l'autre" (Remarque 62, Livre VIII)

Cette citation illustre la duplicité et l'hypocrisie que l'auteur observe à la Cour.

La Bruyère n'hésite pas à mettre en scène des situations comiques qui tournent en ridicule ses personnages. Par exemple, dans la remarque 19 du Livre VIII, Arrias affirme à tort connaître Sethon, qui lui répond : "C'est Sethon à qui vous parlez...". Ce coup de théâtre ridiculise le personnage et souligne sa prétention.

Highlight: La critique de La Bruyère s'étend à tous les aspects de la société, y compris le langage. Il se moque des précieux et de leur langage incompréhensible, comme dans la remarque 6 du Livre V où Acis demande : "Est-ce un si grand mal d'être entendu quand on parle, et de parler comme tout le monde ?"

En analysant finement les comportements et les situations, La Bruyère offre une comédie sociale riche et nuancée, qui reste pertinente même pour les lecteurs contemporains.