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05/02/2022
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Devoir de français Marie ADAM 101 << Les passions peuvent me conduire mais elles ne sauraient m'aveugler >> Cette phrase issue de la Princesse de Clèves illustre a elle seule toute la réflexion de Mme de La Fayette dans son oeuvre phare. En effet, les passions mises en exergue par tous les personnages, principalement le Duc de Nemours et la Princesse, sont au cœur d'un récit aux dimensions tragiques,et cathartiques. Du latin passio, la pas- sion est formé sur le participe passé du verbe déponent patior qui signifie souffrir, supporter, endurer autant qu'il evoque un aspect quasi christique. Publié en 1678, cet élément essentiel est d'autant plus pertinent que l'ouvrage prend place en plein classicisme, dont la doctrine se caractérise par le sens des proportions et la re- cherche d'une harmonie tout en pudeur. Placer la passion au centre de son œuvre, peut donc relever de l'épreuve et nous amène à réfléchir sur le geste et l'ambition de son auteur à l'écriture de la princesse de Clèves. Ainsi, quel regard Mme de La Fayette porte-t-elle sur les passions ? Les passions font-elles dans ce roman l'objet d'une condamnation explicite ? Il s'agira de mettre en évidence l'apparente condamnation des passions amoureuses par l'auteur en particulier sous les formes qu'elle prend à la Cour, pour ensuite saisir la...
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relation plus complexe des passions à sa réflexion mais d'abord et avant tout vis à vis du lecteur. Le personnage de roman est bien souvent aux prises avec un milieu social. Dans La Princesse de Clèves, le lecteur se retrouve au coeur de la cour avant même de ren- contrer l'héroïne qui donne son nom au roman. En effet, son auteur, Madame de Lafayette dépeint la Cour d'Henri II. On peut ainsi lire que « la magnificence et la galanterie n'ont jamais paru en France avec tant d'éclat que dans les dernières an- nées du règne de Henri II ». Les premières pages de ce livre nous y plonge et l'au- teur s'attarde, dès les premières lignes, sur les liens qui unissent le roi à Diane de Poitier, duchesse de Valentinois, maîtresse du roi, et leurs sentiments passionnels: << quoique sa passion pour Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois eut commen- cé il y avait plus de vingt ans, elle n'en était pas moins violente ». Le choix d'associer le mot « passion » à la « violence » traduit la volonté de l'auteur de donner une vi- sion négative de la passion. De plus, la Cour apparaît comme un lieu de galanterie, de duplicité, de secrets et as- sez immoral: « l'ambition et la galanterie étaient l'âme de cette Cour ». Ce lieu est aussi l'endroit des rumeurs. Ainsi, à la suite de l'aveu de la Princesse à son mari des sentiments qu'elle porte pour le Duc, la Cour devient le centre de conversations sur cette passion. On dit de cet univers que l'on songe seulement « à s'élever, à plaire, à servir ou à nuire ». Ainsi, il semble qu'en ce lieu la vertu ne soit pas la maîtresse de maison et Madame de Lafayette semble plus ou moins condamner cela. Par ailleurs, la représentation de la passion dans ce roman apparait comme si ce sentiment consumait les personnages de l'intérieur. Les deux personnages princi- paux sont d'ailleurs détaillés comme des êtres extraordinaires. D'une « beauté époustouflante » le Duc est décrit comme « un chef d'oeuvre de la Nature » et la Princesse comme une personne dont « le bien, la vertu et le mérite étaient extraor- dinaires ». Une description elle-même un peu éloignée de la raison. Madame de La Fayette choisit donc des personnages hors du commun, idéalisés. Elle décrit leur coup de foudre (vocabulaire typique de la passion): « la passion de M. de Nemours pour Mme de Clèves fut d'abord si violente qu'elle lui ôta le goût et même les sou- venirs de toutes les personnes qu'il avait aimées ». A nouveau, on trouve l'adjectif << violent ». La princesse quant a elle doit lutter contre ses sentiments, ses envies furieuses de voir le Duc, et l'ambivalence de son état « à la fois rassuré et déçu de s'éloigner de lui ». Madame de Lafayette nous fait partager ce mouvement complexe qui anime les personnages et éloigné de tout bon sens. Les longues phrases em- ployées traduisent aussi des sentiments contraires : « elle ne pouvait s'empêcher d'être troublée de sa vue, et d'avoir pourtant du plaisir à le voir ». C'est égaler que confirment les propos de Monsieur de Clèves qui dit : « je n'ai que des senti- ments violents et incertains dont je ne suis pas le maître. Je ne me trouve plus digne de vous ; vous ne me paraissez plus digne de moi. Je vous adore, je vous hais, je vous offense, je vous demande pardon ; je vous admire, j'ai honte de vous admirer ». Cet état de passion est aussi transmis d'une certaine façon aux autres personnages car n'oublions pas qu'il éprouve lui aussi une vive passion à l'égard de sa femme. Dans la passion, ils ne sont donc plus maîtres de d'eux-mêmes. Ils semblent morcelés par des forces opposées, prisonniers de leurs pulsions et dépos- sédés de leurs libertés. ce Enfin, les personnages sont progressivement dominés par des sentiments peu ver- tueux comme la jalousie. En effet, la Princesse, malgré l'éducation qu'elle a reçue, se retrouve de nombreuses fois en proie à ce sentiment qu'il lui était jusque-là inconnu au point : « de lui donner des impressions de défiance et de jalousie qu'elle n'avait jamais eues ». Le passage au cours duquel Madame de Clèves découvre la lettre d'amour qu'elle croit adresser au duc nous montre qu'elle souffre de sa découverte : je suis vaincue et surmonter par une inclination qui m'entraîne malgré moi » ou encore << Jamais affliction n'a été si piquante et si vive ». De son côté, Monsieur de Clèves se laisse mourir de chagrin après avoir découvert la passion de son épouse pour un autre homme que lui. On peut retrouver un autre exemple de passion dans Le rouge et le Noir de Stendhal dans lequel Julien éprouve une vive passion pour Mme de Rénal une femme mariée, passion partagée qui poussera Mme de Rénal a envoyé une lettre dénonçant la liaison de Julien avec Mathilde par jalousie. Madame de Lafayette fait le choix de ne pas apporter de fin heureuse, M de Clèves meurt de chagrin, Mme de Clèves est obligée de quitter pour de bon la haute société et de s'installer dans un couvent pour échapper à la passion et le Duc de Nemours est détruit par le fait de ne pas pouvoir vivre avec la femme dont il est tombé amou- reux. La passion est donc associée à des tourments et à une souffrance telle qu'elle peut être proprement mortelle. Au travers de son œuvre, il m'apparait que Madame de Lafayette ne condamne pas tant que cela la passion mais prône la force de caractère et le courage moral qui peuvent pousser quelqu'un à faire le bien en toutes circonstances. En effet, le par- cours de son héroïne est un combat héroïque pour faire triompher la raison sur la passion. On peut illustrer cette détermination dont Madame de Clèves fait preuve par le fait qu'elle finit par choisir de se réfugier au Coulommiers. Elle se retire de la Cour pour rester fidèle à son mari. En outre, lors du dénouement de son récit, l'auteur nous renvoie à nous-même car on est tenté de s'interroger sur ce que nous aurions fait dans cet état de passion. La Princesse de Clèves, elle, aurait pu s'abandonner à la passion qu'elle ressentait à l'égard du Duc de Nemours mais au lieu de cela, elle décide de renoncer à sa pas- sion. On suppose qu'en restant fidèle à la mémoire de son époux, en se retirant dans une maison religieuse, et en refusant de répondre à l'appel de la passion, elle devrait retrouver la paix. Cette recherche de la solitude n'est pas sans rappeler les dernières années de la vie de l'auteur elle-même. En effet, après la mort de La Rochefoucauld, suivie de celle de son mari, Madame de Lafayette cessera toute activité mondaine, vivra dans une retraite de plus en plus moins totale, et se consacrera à la méditation religieuse, en poursuivant une correspondance avec un religieux, l'Abbé de Rancé, réformateur de La Trappe. Son héroïne laisse « des exemples de vertu inimitables », pour reprendre les derniers mots du roman. De cette manière, on peut lire ce roman comme une vision de l'auteur assez négative sur la passion et un moyen de faire ré- fléchir les lecteurs sur cet état. On peut également s'interroger sur le fait de savoir si l'auteur n'essaye également pas de se convaincre de son aspect négatif. Nietzsche disait « s'attaquer aux passions à la racine, c'est s'attaquer à la vie à la ra- cine» ce qui sous-entend que l'existence des passions est indéniablement rattachée à la vie et à en ressentir l'existence. En faisant des passions, le cœur de son roman, Madame de Lafayette pousse le lecteur à réfléchir sur ce sujet. Le choix du point de vue interne plonge le lecteur dans l'état de dilemme des personnages. Par exemple de la scène de l'aveu émane de nombreuses questions sur la vraisemblance de la si- tuation, et sur le choix de venir se confesser à son mari. De plus, La Princesse de Clèves met en lumière plusieurs états de passions et aborde différents points de vue sur les passions, chacun venant enrichir la définition de la passion. Par exemple, la mère de la princesse, Madame de Chartre, donne une édu- cation originale à sa fille en choisissant de lui parler ouvertement des passions pour la mettre en garde tandis que la plupart des mères de l'époque agissaient comme si cela n'existait pas. L'auteur donne au lecteur un point de vue de mère. En revanche, le personnage du Duc de Nemours apparaît comme prêt à tout pour vivre pour sa passion qu'il l'anime et en écoutant que son cœur et non plus sa raison. Catherine de Médicis animée par une passion du pouvoir ou encore le personnage de Mme de Tournon qui se jouer de Sancerre ou également Mme de Clèves torturé entre pas- sion et vertu. Ainsi, ce large panel de forme de passion ouvre le débat et élève la ré- flexion, c'est en partie ce qui rend ce roman intemporel L'auteur laisse aussi voir que vivre une passion apparaît comme quelque chose de positif dans la mesure où cela permet de se comprendre et de se découvrir. La nais- sance de sentiments à l'égard du duc permet à la Princesse de Clèves d'éveiller en elle des sentiments complexes qu'elle ne connaissait pas qui la font passer par l'atti- rance, l'amour jusqu'au sentiment de jalousie, en laissant de plus en plus une part importante aux soliloques du personnage, qui accède progressivement à une com- préhension de la nature profonde de son être. Elle va vivre un véritable processus de maturité car la Princesse de Clèves se montre capable, dans la dernière partie de l'œuvre, d'exposer au duc les raisons de son refus de l'épouser, dans un discours long parfaitement construit. Le lecteur va évoluer avec le personnage principal du livre. Finalement, l'enjeu du roman n'est pas de condamner la passion mais de faire réflé- chir le lecteur à ce sujet en lui donnant à voir la destinée d'une personne aux prises avec elle. On retrouve d'ailleurs certains codes esthétiques et moraux de la préciosi- té avec l'influence du jansénisme, mouvement religieux, puis politique et philoso- phique, qui se développe aux XVIIème et XVIIIème siècle par lequel le salut de l'âme humaine, est accordé ou refusé par avance, sans pouvoir n'y rien faire par ses actes. En conclusion, il n'est pas étonnant qu'encore aujourd'hui, la Princesse de Clèves puisse susciter le débat, le thème de la passion permettant à chacun de pouvoir s'exprimer avec une lecture compréhensive ou révoltée de l'œuvre mais toujours très humaine. En 2006, l'ancien Président Sarkozy alors ministre de l'Intérieur s'étonnait de voir l'œuvre figurer au programme du concours d'attaché d'adminis- tration, et déclencha une polémique et de fortes réactions. Le choix de ce livre n'était peut-être pas anodin car il nous amène aussi à s'interroger sur le rôle de la femme et du contrôle imposé de ses sentiments dans une société encore très pa- triarcale.