Introduction à Vénus anadyomène de Rimbaud
Arthur Rimbaud 1854−1891, ce poète maudit et rebelle, a écrit les Cahiers de Douai pendant la période tumultueuse de la guerre franco-prussienne. "Vénus anadyomène", deuxième poème du recueil, présente un paradoxe saisissant : une forme traditionnelle (le sonnet) traitant d'un sujet classique (la naissance de Vénus), mais avec une approche révolutionnaire.
La problématique centrale est claire : comment Rimbaud bouscule-t-il les codes de la poésie traditionnelle ? Le poème décrit la déesse de façon péjorative, suivant son émergence des eaux (sens de "anadyomène") dans un mouvement vertical : de la tête au postérieur, créant un portrait délibérément choquant.
La structure du poème suit cette progression anatomique : d'abord la tête vers1−4, puis le buste vers5−6, ensuite les reins vers7−12, et enfin le postérieur vers13−14. Cette organisation méthodique contraste avec la description repoussante, créant une tension artistique.
💡 Rimbaud utilise des techniques littéraires sophistiquées pour transformer le sublime en grotesque : comparaisons surprenantes, enjambements, allitérations et un vocabulaire délibérément provocateur.
Les premiers vers illustrent parfaitement cette technique : la comparaison inattendue à "un cercueil vert en fer blanc" introduit d'emblée les thèmes de mort et de vieillesse, à l'opposé de la jeunesse et beauté associées traditionnellement à Vénus. L'image d'une "vieille baignoire" d'où émerge une tête "lente et bête" établit le ton résolument anti-lyrique du texte.