La désillusion et le retour à la réalité
Le rêve d'Emma commence à se dégrader subtilement. Les verbes au conditionnel présent comme "s'arrêteraient", "habiteraient" soulignent le caractère irréel de ces désirs. Les images s'affaissent progressivement : les hauteurs du début ("montagne", "dôme") cèdent la place au "bord de la mer" et à une "maison basse à toit plat".
Flaubert joue habilement sur les contrastes : "L'immensité" s'oppose au "rien", les jours sont "magnifiques" mais monotones "comme des flots", l'horizon est "harmonieux" mais "bleuâtre". Les couleurs vives du début s'estompent pour laisser place à un bleu délavé, signalant la fin imminente du rêve.
Le dernier mouvement marque un retour brutal à la réalité introduit par la conjonction "Mais". Les allitérations en s et en r évoquant la toux de l'enfant et les ronflements de Charles créent une cacophonie qui contraste violemment avec la douceur du rêve. Emma, qui "ne s'endormait que le matin", vit à contretemps de la société, signe de sa marginalité.
La référence finale à "la pharmacie" fonctionne comme une préfiguration tragique du destin d'Emma, qui se suicidera en avalant de l'arsenic volé à la pharmacie. Cette conclusion suggère que ses rêveries excessives la conduiront à sa perte.
💡 Le portrait d'Emma Bovary dans cet extrait illustre parfaitement la critique du romantisme par Flaubert : l'illusion romantique, loin d'être libératrice, devient une prison mentale qui mène à la désillusion et, ultimement, à la destruction.