Philosophie et langage : de la sagesse antique aux dérives totalitaires
Socrate, Platon et Aristote ont posé les bases de notre réflexion sur la parole au 4e-5e siècle avant JC. Socrate développe la maïeutique, l'art d'accoucher les âmes d'elles-mêmes - en gros, il aide les gens à trouver la vérité par eux-mêmes grâce au dialogue. Pour ces philosophes grecs, l'intelligence et la raison permettent d'accéder à une vérité unique et universelle.
Face à eux, Gorgias représente les sophistes - ces maîtres de l'art oratoire qui se font passer pour ce qu'ils ne sont pas. Contrairement aux philosophes, les sophistes utilisent la parole pour convaincre et persuader, jouant avec les émotions et manipulant leur auditoire sans chercher la vérité.
Au 20e siècle, les penseurs comme Victor Klemperer, Hannah Arendt, Paul Ricœur et Gilles Deleuze analysent comment cette opposition antique entre philosophie et sophistique trouve un écho tragique dans les régimes totalitaires.
💡 Retiens ça : La différence fondamentale ? Les philosophes cherchent la vérité, les sophistes cherchent à avoir raison !
Victor Klemperer, écrivain et philologue allemand d'origine juive, montre dans LTI, la langue du IIIe Reich comment le nazisme a corrompu la langue allemande. Sa thèse : la langue précède la pensée, donc contrôler la langue, c'est contrôler les esprits. Les langues totalitaires fonctionnent par répétition, réutilisation d'anciens mots détournés, et transmission d'idées uniques pour asseoir le pouvoir.
Hannah Arendt analyse dans Les Origines du totalitarisme comment les régimes du 20e siècle (nazisme, stalinisme) détruisent l'espace public démocratique. Dans une démocratie, cet espace permet d'apparaître aux autres, d'exister par la parole, et d'enrichir nos perspectives grâce aux opinions divergentes. Le totalitarisme, lui, malmène cet espace par la propagande, l'antisémitisme, et l'impérialisme.