Un temps suspendu dans l'horreur
Le troisième mouvement lignes20−26 achève cette réflexion sur le temps. Dans les camps, la nuit n'a plus le même sens - elle ne finit jamais vraiment pour "celles qui délirent dans les revirs" (l'infirmerie du camp).
Delbo atteint des sommets poétiques avec l'hypallage "les étoiles glacées au ciel glacé". Cette figure de style géniale transpose le froid ressenti par les femmes sur le paysage lui-même. L'image devient universelle et saisissante.
La répétition finale du mot "ombres" résume parfaitement la déshumanisation : ces femmes ont perdu leur corps et leur humanité. Le texte se clôt sur l'adjectif numéral "mille" répété, qui grave dans notre mémoire l'intensité inouïe de cette souffrance.
L'alchimie poétique de Delbo réussit son pari impossible : transformer la boue en or, l'innommable en beauté littéraire qui résiste à l'oubli.
Pour tes révisions : Retiens cette technique unique de Delbo qui mélange témoignage historique et création poétique - c'est ce qui rend son œuvre si puissante et universelle.