Le patrimoine, objet de conflits et d'enjeux internationaux
Le patrimoine est souvent instrumentalisé à des fins idéologiques. Des régimes totalitaires comme celui de Mussolini ont utilisé le patrimoine romain pour légitimer leur pouvoir, tandis que la propagande nazie s'est appropriée l'art gothique. Certains régimes n'hésitent pas à effacer des pans entiers du patrimoine, comme lors de la révolution culturelle de Mao qui s'attaquait à la culture traditionnelle chinoise.
La restauration du patrimoine bâti suscite d'intenses débats. La Charte de Venise de 1964 recommande de restaurer les bâtiments dans leur dernier état connu, mais ces principes ne sont pas contraignants. Des projets comme la reconstruction de la flèche de Notre-Dame après l'incendie de 2019 ou la destruction du Palais du Peuple à Berlin génèrent des polémiques sur la mémoire collective.
Le patrimoine représente un véritable enjeu de puissance diplomatique. La Chine pratique la "diplomatie du panda" en prêtant ces animaux considérés comme trésors nationaux. Des monuments comme le château de Versailles servent de cadre prestigieux aux rencontres diplomatiques et aux événements constitutionnels français depuis 1961.
💡 Les frises du Parthénon illustrent parfaitement les tensions patrimoniales : acquises par le Royaume-Uni au XIXe siècle alors que la Grèce était sous domination ottomane, elles font l'objet d'une demande de restitution depuis l'indépendance grecque en 1822.
La valeur économique du patrimoine est considérable. Le marché de l'art génère des transactions colossales, comme l'illustre la vente du tableau "Salvador Mundi" de Léonard de Vinci pour 382 millions d'euros en 2017. Malheureusement, cette valeur attire aussi les convoitises illégales - Daech a partiellement financé sa guerre en Syrie et en Irak par le trafic d'œuvres d'art.
La question de la restitution des œuvres devient de plus en plus pressante. La Déclaration de Washington (1998) engage 44 états à restituer les œuvres volées aux Juifs pendant la guerre. Plus récemment, le rapport Savoy-Sarr de 2018 a créé la polémique en invitant la France à restituer les œuvres acquises pendant la période coloniale en Afrique.